Berlin, avril 1945. Les soldats russes sont aux portes de la ville.
Une poignée des fidèles célèbrent l’anniversaire du Führer : Heinrich Goebbels et ses six enfants, le serviteur Linge et Eva Braun, avec qui Hitler s’est marié la veille de ce jour funeste. Coincés comme des rats dans leur bunker, le dictateur et sa cour noient leurs angoisses dans des vapeurs d’alcool et de tabac. Le plafond est prêt à s’effondrer.
bouches démesurées, yeux hallucinés, les pantins extraordinairement expressifs, habités et crédibles, trahissent l’immense noirceur de ces bourreaux décatis et l’abîme de médiocrité qui leur tient lieu d’âme. Lorsqu’il entre sur scène, Tranter est l’adjudant Heinz Linge, factotum du Führer. Il tient à bout de bras une marionnette qui se rebiffe : «j’aimerais mieux jouer un autre personnage». D’autorité, il lui colle la moustache emblématique. Puis donne voix à l’énorme Goering, aux enfants de Goebbels, Eva Braun et même au chien Blondie. Soliste extraordinaire, jonglant avec dextérité entre ses personnages, le comédien manipulateur babille ou tonne, chevrote ou gronde, soutient l’un, console l’autre, prépare les pilules fatales.
Impitoyable, dans un chassé-croisé de dialogues impertinents, cette poétique macabre et magistrale vaut un mémorial. Indispensable.
Production Stuffed Puppet Theatre